La reine Marie-Antoinette

Pierre de Nolhac

Tout un univers d’images, d’émotions, de fantaisie et d’imaginaire jaillit au seul énoncé de son prénom : Marie-Antoinette. Et c’est le grand mérite de l’auteur d’avoir su écarter ce rêve pour révéler derrière lui la belle et simple réalité qu’il travestissait : une Femme.
Élevée par son statut au plus haut rang de l’échelle sociale, elle choisit de se battre pour le seul droit qui lui était refusé : être elle-même.
Jusqu’à l’holocauste suprême.
Elle y aura gagné l’éternité.
(Édition annotée.)

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ISBN : 978-2-38371-059-2
9782383710592 19,50 €
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Le Roi parlait d’une voix nette et assez ferme. Toute l’assemblée était debout, tête nue, dans la lumière adoucie qui tombait des grandes baies sur les tentures, les colonnes et les tapis. C’était une mise en scène grandiose et symbolique. La nation était bien représentée là, telle que les derniers siècles monarchiques l’avaient constituée. Tout en haut, le Trône, dans sa pompe traditionnelle, entouré de la Cour et appuyé sur ses deux soutiens, le Clergé et la Noblesse. En bas, le Tiers, qui se tenait à son humble place, sans costume d’apparat, sans plumes et sans broderies, mais fort de son nombre et de ses droits, le Tiers qui n’était rien encore dans l’État, ou presque rien, et qui demain allait être tout.

Pour la dernière fois, Marie-Antoinette paraissait en reine de l’ancien régime, dans une cérémonie publique. Elle semblait en deviner quelque chose, et dissimulait mal son émotion sous les sourires officiels et les saluts de la tête distribués à tous. Tandis que le Roi prononçait son discours, promesse de justice et de dévouement à son peuple, tandis que le long rapport de Necker sur l’état des finances se déroulait devant l’attention soutenue et avide de l’auditoire, la Reine songeait aux choses nouvelles que cette journée inaugurait pour la royauté. Ses yeux distraits erraient sur ces fronts d’inconnus, venus de tous les coins de la France, qui représentaient la nation et en qui elle sentait vaguement la puissance de l’avenir. Elle se demandait avec inquiétude combien d’amis elle pouvait avoir dans cette foule, combien de défenseurs l’héritage de ses enfants y compterait à l’heure décisive. Mais sans cesse elle rencontrait, tourné vers elle, le regard ironique du duc d’Orléans, et chaque fois revenait à son oreille, comme une menace obsédante, le cri de la veille, le cri d’insulte des femmes de Paris, avec l’intonation sinistre.

Pierre de Nolhac

Pierre Girauld de Nolhac, dit Pierre de Nolhac (Ambert 1859 – Paris 1936)
Écrivain, poète, historien, il a eu dans sa vie deux amours : les Antiquités latines et le XVIIIe siècle français – Rome et Versailles. Ses recherches sur Pétrarque feront date. Ce fort lien affectif à l’humanisme de la Renaissance italienne et à l’esthétisme de la France de l’ancien régime l’accompagnera toute sa vie, qu’il fût Conservateur du Château de Versailles ou directeur du musée Jacquemart-André. Élu à l’Académie française en 1922, il laissa une oeuvre abondante et raffinée.

I. – Le règne
II. – La cour et les fêtes
III. – L’intimité
IV. – Trianon
Sources
Appendice